Verbe espagnol qui signifie "revenir".
Mon père a passé les premières années de sa vie
au pays de Gardel qui a chanté le tango "volver".
Un poème qui résume ma vie
Revenir à l’impatience des notes acides et vertes
du piano dans l’air lourd qui courbe les trémières
à l’heure trouble des siestes dans la maison déserte
où rode sous les ombres le désir incendiaire.
Sous les premiers tilleuls aux effluves tisanes
effleurer les genoux des jupes découvertes,
insouciance du temps où les mots légers flânent
quand glissent les regards vers les blouses entrouvertes.
Retourner sur les pentes des premières collines
sur un vélo ancien lesté comme du plomb
pour le premier départ, l’évasion clandestine
pour dévorer le monde d’un élan vagabond.
Les draps tordus de rage comme autrefois Cendrars
fuir en Transsibérien aux confins de la Chine
lancer sa vie aux dés, aux défis du hasard
vers un ciel sans limite que les yeux hallucinent
Retrouver dans ses reins les forces en croissance,
le Stream tourbillonnant qui s’élance en spirale
et propulse l’ouragan de son adolescence.
Lancer la fulgurance des vagues viscérales
vers l’aplomb des falaises pour arracher les pierres
du passé, broyer le temps, son ordre minéral
réduire les traditions en poussières glaciaires.
Détruire, casser, brûler, en fête bacchanale
Recommencer encore à brûler les icones,
mettre en cause les dogmes, les rites Esséniens,
réinventer le monde, jouer les Antigone
cranes rasés, cheveux hirsutes, rites païens
s’afficher sur les murs, occuper des Sorbonne
bruler en effigie les bourgeois exécrables
railler « les retraités qui tisonnent le sable »
dont se moquait Rimbaud à quinze ans en Argonne.
Redécouvrir le monde, vêtu d’un blouson noir
pour fouiller les déserts et les îles lointaines
qu’on rêvait encore vierges, qu’on croyait en mémoire
dans l’air bleu et si calme des palmes de Verlaine.
Rochers où désormais les déchets se déversent
envahis par les foules comme une algue lépreuse
où il reste à pleurer aux vers de Saint John Perse
les « fêtes boréales aux mains de l’habilleuse ».
Re-souvenir le jouir comme disait Gauguin
dans les îles Marquises. Voir le soir, effronté,
un corps qui se dévêt des reflets sur les seins.
Sentir le bois de cade dans la chambre bleutée
les tresses dénouées. Bras levés la soie glisse
dans un tendre soupir sur le parquet ciré.
Les bras forment une liane comme un volubilis
sous la lueur de la lune. Le temps s’est arrêté.
Repartir en enfance au cercle chaud des mères,
des sœurs, des cousines. Autour de l’abat-jour
s’enfouir les bras aux bras, au rempart, au repaire,
dans l’odeur de l’étable, la tiédeur de l’amour.
La tendresse coule en miel à Noël le matin
quand on frotte son front aux robes de velours.
Un enfant est parti, je sens encore sa main
qui m’accompagne, il ne m’a pas manqué d’un jour.
Revivre : la nostalgie faut lui tordre le cou !
Volver ! La vie va faire résilience.
Forget, again, pas peur, on s’élance vent debout
ce matin on lève l’ancre pour la vie en partance,
ce matin on a chaussé des semelles de vent.
Le fond du ciel est clair on aura sa clémence,
les drisses et les haubans dorment sur le gréement.
Ça va ? Ca va ! Tu vas où ? J’sais pas : j’recommence !
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